Quand on parcourt les forums et groupes Facebook dédiés à Porsche, on se dit que les fans de la marque sont avant tout friands de sportivité et de performances, et que les équipements high-tech ou de confort ne sont pas trop leur tasse de thé. Généralement ça parle plutôt PDK que PCM, et plus souvent circuit que balade au soleil couchant. D’ailleurs la marque n’a jamais caché son ADN, qui consiste d’abord à orienter ses investissements R&D dans l’amélioration du rendement des moteurs et des châssis que dans le dernier écran interactif.
Mais tout change très vite, et Porsche ne pouvait pas rester très longtemps sur le bord de la route (ou de la piste) à regarder ses concurrents emboiter le pas du digital sans réagir. C’est chose faite avec cette nouvelle version de la Panamera. Et de façon magistrale.
Porsche investit massivement dans les technologies numériques
Les premiers signaux forts de la mutation digitale de Porsche ont été émis lorsque la marque de Stuttgart a dévoilé au Salon de Francfort 2015 la Porsche Mission-E, puis annoncé au printemps 2016 le recrutement de Thilo Koslowski, un expert en technologies numériques automobiles de chez Gartner, venu tout droit de la Silicon Valley, pour ce qui était une création de poste de Responsable de la mobilité digitale au sein de la direction de Porsche AG.
Selon lui, « le numérique inaugure une renaissance de l’automobile, et fait de la voiture un élément central de notre style de vie numérique ».
Afin de devenir un fournisseur leader de solutions de mobilité numérique dans le secteur haut de gamme, Porsche a fondé une nouvelle société, Porsche Digital GmbH, avec notamment des filiales dans la Silicon Valley et en Chine, là où se trouve l’innovation. Thilo Koslowski est son Directeur Général. Porsche Digital GmbH se considère aussi comme une interface entre Porsche et innovateurs dans le monde entier. Cela vaut particulièrement pour les domaines de la connectivité, la mobilité intelligente, et la conduite autonome. Et il comprend la recherche de partenaires appropriés en ce qui concerne la transformation de la numérisation en cours chez Porsche et la définition d’un écosystème numérique. La participation à des fonds de capital-risque et des start-ups va générer des synergies avec des entreprises innovantes et à forte croissance et les nouvelles technologies.
Selon Oliver Blume, CEO de Porsche, les concepts-clés sont désormais l’électrification, la digitalisation et la connectivité, qui représentent une rupture dans l’industrie automobile, y compris pour Porsche. Pour lui, « une voiture intégralement connectée et sans conducteur ne peut être conçue qu’en coopération étroite avec des entreprises du secteur de la technologie numérique ».
Les premières applications concrètes de cette nouvelle politique n’ont pas tardé à débarquer, avec l’intégration d’Apple Car Play et par la même occasion de nouveaux écrans digitaux dans la nouvelle 991 Phase 2, qui seront progressivement étendus à toute la gamme… en attendant le nouveau Cayenne.
Mais c’est sur la nouvelle Panamera 2017, récemment dévoilée et présentée à la presse française lors d’un showroom privé à Paris le 16 septembre que le public va découvrir le nouveau visage de Porsche en matière d’intégration des technologies numériques. Porsche n’a rien révolutionné dans ce domaine, mais – un peu à l’image d’un Apple – a observé, digéré… et fait mieux que les concurrents.
Le catalogue des nouvelles fonctionnalités de confort, de sécurité et d’info-divertissement de la Panamera 2017 serait un peu trop long à détailler, mais c’est surtout l’impression générale qui prévaut, renvoyant le modèle actuel à quelque-chose d’assez rustique quand on voit les progrès, et, disons-le, la petite révolution que constitue le nouveau cockpit de la berline sportive signée Porsche.
« Cockpit virtuel » et écran tactile : Porsche numérise la tradition
La première chose qui saute aux yeux est évidemment le nouveau tableau de bord. En observateur attentif de la marque et incorrigible geek, un point m’intriguait : Porsche oserait-il passer au tableau de bord virtuel ? Si oui, quand et de quelle façon cette rupture serait-elle abordée ? Car les fameux cinq cadrans avec le gros compte-tours au centre, héritages d’un long et prestigieux historique en compétition, constituent l’un des marqueurs forts de l’identité de Porsche. Et quand on connait l’attachement de la marque à ces signes distinctifs, et ce talent unique à savoir marier tradition et modernité, le challenge était probablement de taille. Porsche a relevé le défi à sa manière : en gardant le meilleur des deux. Il fallait y penser. Ainsi le compte-tours est conservé dans sa forme traditionnelle, à savoir un gros cadran rond physique à aiguille au centre du combiné d’instruments. mais les quatre autres cadrans, de part et d’autre de ce dernier, sont remplacés par deux écrans haute résolution.
Ceux-ci permettent, selon les besoins, d’afficher différentes informations, telles que la navigation ou l’assistance à la vision nocturne (une caméra infrarouge détecte les piétons ou les animaux assez grands avant même que ceux-ci ne soient éclairés. Une image de la caméra thermique affichée sur le combiné d’instruments en informe le conducteur). Situé directement à gauche du compte-tours se trouve le compteur de vitesse, qui permet d’afficher en son centre les données du régulateur de vitesse adaptatif. Dans l’écran sur le côté gauche apparaissent au choix l’affichage des limitations de vitesse, la détection de la signalisation routière ou la température extérieure. Sur le côté droit, les possibilités sont encore plus variées puisque l’écran intérieur permet d’afficher l’ordinateur de bord, l’indicateur de niveau de carburant ou l’autonomie restante. A l’instar d’un Tesla ou d’une Audi et son Virtual Cokpit, il est en outre la possible d’afficher la carte du système de navigation, qui occupe alors toute la partie droite du combiné.
Un écran = de multiples fonctions
Côté commandes, on connait l’attachement légendaire de Porsche au concept « Un bouton = une fonction », également issu de la course automobile. Sans avoir totalement sacrifié cette tradition bien ancrée qui faisait ressembler le poste de pilotage du modèle précédent de la Panamera à un cockpit d’Airbus, Avec cette nouvelle version et le Porsche Advanced Cockpit, le constructeur a largement remplacé l’essentiel des boutons par des commandes tactiles, la plupart regroupées sur l’immense écran central de 12 pouces (rappel, un iPad standard fait 9,7 pouces) parfaitement encastré et affleurant dans la continuité de la planche de bord.
D’un point de vue esthétique, le rendu est juste sublime avec ses surfaces laquées et ses boutons à retour haptique (sensation vraiment troublante d’appuyer réellement sur un basculeur alors que l’on est sur une surface plane et inerte). L’écran central est parfaitement intégré et sa définition ainsi que sa fluidité évoquent au toucher les meilleures tablettes tactiles actuelles. Le design d’interface a été entièrement revu et toutes les informations s’affichent sur un fond noir profond qui respire vraiment la classe tranquille. C’est à ce genre de détail que l’on comprend à quel point un constructeur automobile a travaillé sur sa conversion au digital. Tout est propre, bien rangé, bien présenté, on dirait… du Apple.
Porsche Connect, pour les geeks de luxe
En matière d’automobile, il ne suffit pas (ou plus) de proposer une planche de bord avec des écrans interactifs pour pouvoir se proclamer comme un constructeur ayant accompli sa transition digitale. Il faut prouver un peu plus, en proposant des fonctions connectées et intelligentes, de confort et/ou de sécurité. Là encore, Porsche a fait l’essentiel en proposant une palette de services inclus dans son pack Porsche Connect. La Panamera 2017 est ainsi dotée d’origine d’une puce 4G lui permettant entre autres d’afficher sur son écran central des services Web comme Google Earth et Street View, la nombre de places disponibles dans les parkings environnants, les spectacles dans la ville que vous visitez, les informations détaillées sur votre prochain vol ou encore les dernières actualités, le tout dans un affichage en mode web, avec textes et images, et guidage par navigation GPS directe d’un clic vers le lieu souhaité.
Parmi les fonctions principales de Porsche Connect, il est possible de visualiser directement un lieu de destination sur Street View, de programmer un itinéraire sur son smartphone et de le transmettre d’un clic à la voiture, d’utiliser la messagerie vocale Siri avec Apple Car Play, de configurer son portail de news (que la voix de synthèse peut vous lire oralement), de vérifier si toutes les portes sont bien fermées en regardant sur l’écran d’une Apple Watch, ou encore de poster et écouter des messages sur Twitter. Entre autres.
Comme le rappelait Oliver Blume, « Vous devez absolument connaitre vos clients, ou anticiper ce qu’ils aimeraient avoir. Mais si l’innovation se résumait à cela, les frères Wright auraient continué à vendre des bicyclettes au lieu d’inventer l’aviation ».
Porsche n’a peut-être pas inventé l’aviation, mais la Panamera 2017 pourrait bien en faire planer plus d’un.